Idée reçue « #metoo va améliorer les rapports hommes-femmes » 1/2
Tom presse le pas pour ne pas rater son bus. Il sort du travail et a hâte de retrouver sa femme et ses deux enfants. Ses enfants. Rien que d’y penser il sourit et son cœur se fait gros de bonheur.
Il est d’autant plus heureux qu’ils ont eu du mal à les avoir à cause de ses problèmes d’érection. C’est vrai que depuis les lois de Pénétration Contrôlée de l’été 2043, les lourdeurs administratives pour avoir un rapport sexuel avec sa femme le gênaient beaucoup.
Le formulaire avec consentement sur l’honneur qu’elle devait remplir avant chaque pénétration comportait quand même une page entière de texte à recopier à la main obligatoirement. Déjà cela cassait pas mal son désir. Le pire pour lui venait ensuite quand il scannait les documents pour les envoyer à l’administration #metoo.
Surtout qu’ils aimaient faire l’amour le samedi soir et que les demandes affluaient justement ce jour de la semaine. Il fallait donc attendre parfois jusqu’à 45 minutes avant d’avoir une « ARSP ».
Une Autorisation de Rapport Sexuel avec Pénétration.
Le supplice continuait encore pour lui quand il installait le matériel vidéo. L’idée que quelqu’un allait juger de la légalité de son acte sexuel en regardant le film de ses ébats le mettait mal à l’aise. C’était même très difficile car il avait déjà eu un avertissement. En effet, au cours d’un de leur rapport sexuel précédent, sa femme avait oublié de dire une partie de la déclaration pré-pénétration.
C’est vrai qu’elle était relativement longue : « Moi [nom de la femme] saine de corps et d’esprit, je donne mon consentement et l’autorisation expresse à [nom de l’homme] le [date] à [heure] de me pénétrer dans le vagin avec son pénis. Cette déclaration est valable uniquement pour cette action et tout autre acte de pénétration devra faire l’objet d’une déclaration à part ».
En plus depuis les amendements de Renforcement de la Loi de Pénétration Contrôlée de l’hiver 2047, la déclaration devait être répétée toutes les 30 secondes. En effet ce durcissement de la loi avait fait suite à de nombreuses condamnations d’hommes pour perte de consentement pré-orgasmique. La plupart du temps l’accusation venait du fait que le conseil #metoo estimait que les femmes se sentaient agressées par l’augmentation du rythme de la pénétration en fin de rapport sexuel.
Donc tout cela donnait des difficultés d’érection à Tom. Mais ils y étaient arrivés. A force de patience et de ténacité.
Ils avaient de plus participé à l’effort national. Car la natalité était la grande cause depuis maintenant plusieurs années. En effet les lourdeurs administratives pour avoir un rapport sexuel ainsi que l’augmentation vertigineuse du célibat avaient fait s’écrouler le nombre de naissances.
Et oui le célibat. Les hommes n’ose plus séduire les femmes. Depuis la Loi de Séduction Contrôlée de 2047…
Le harcèlement sexuel, une notion impossible à légiférer
Au cœur du mouvement #metoo se trouve la notion de harcèlement sexuel et d’agression sexuelle.
La définition du harcèlement sexuel est : » le fait d’imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante « . Source : site du service public.
Le problème de cette définition est quelle est hautement subjective. Une femme se sentira atteinte plus ou moins facilement dans sa dignité selon une multitude de paramètres. Du coup la morale publique essaye de définir une ligne rouge à ne pas dépasser car la justice elle ne peut pas le faire. En effet le système judiciaire repose entièrement sur des faits et non sur du ressenti.
Le ressenti d’une femme harcelée peut être tout-à-fait légitime. Je veux dire elle est peut être réellement harcelée. Mais en l’absence de preuve la justice considère qu’il y a absence de fait. Et donc qu’il n’y a pas harcèlement. C’est pour cela que 90% des plaintes pour harcèlement sexuel aboutissent à un non-lieu. Source : Libération « Peut-on encore draguer au travail? ».
Le mouvement #metoo fait donc au contraire prévaloir le ressenti des femmes. Elles peuvent dénoncer sur les réseaux sociaux si elles estiment qu’elles sont harcelées.
Ceci pour pallier comme on vient de le voir une loi inefficace. C’est la morale publique qui dicte la ligne rouge à ne pas dépasser.
Il y a trois problèmes à cela :
- C’est donc contraire à la loi.
- C’est l’opinion populaire qui va décider ce qui est condamnable ou pas. Car c’est l’écho sur les réseaux sociaux qui va signer la culpabilité.
- Cette ligne rouge est par définition hautement subjective elle aussi.
Et pour définir cette ligne rouge, #metoo nous dit que c’est le consentement qui doit guider nos actes.
Le consentement, une notion impossible à saisir
Malheureusement, le consentement est lui aussi une notion difficile à définir.
Car il subsiste toujours un doute sur le consentement de l’autre. On est pas dans la tête de l’autre donc on ne saura jamais si l’autre est à 100% consentant.
Je ne parle pas des cas d’agressions sexuelles évidents. Je parle des cas ou on va chercher justement à obtenir le consentement de l’autre.
Dans la phase de séduction : avant d’essayer de parler à une femme on ne sait pas si on peut lui parler. Avant de tenter de l’embrasser même si les conditions sont favorables, on ne peut jamais être sûr à 100% qu’elle aimerait être embrassée.
Dans la phase sexuelle également : avant de déshabiller, caresser et pénétrer une femme on n’est jamais complètement certain de son consentement.
La règle, la loi considère que l’essai est acceptable et que le refus de cette femme nous renseigne sur son consentement. Et qu’il faut agir en conséquence. Si une femme se refuse il faut la laisser tranquille.
Mais ce n’est même pas aussi simple que cela. Le consentement peut être donné puis retiré immédiatement. Et il y a même des situations où il est impossible de donner son consentement car la loi considère que vous n’êtes pas capable d’avoir la clarté d’esprit nécessaire.
Par exemple un médecin avec une patiente n’a pas le droit d’avoir de relations sexuelles car la situation empêche cette femme de donner son consentement.
#metoo invente le consentement sûr et certain
C’est là que la dérive commence. Le mouvement #metoo dans sa lutte louable de protéger les femmes se rend compte des problèmes que peut poser la notion de consentement.
Il va donc énoncer deux règles :
- Dans le doute, on s’abstient. Si une femme ne vous a pas déroulé un énorme tapis rouge, vous la laissez tranquille. En gros pas de séduction si elle ne vous a pas appelé.
- Dans le doute on demande le consentement express. Toujours, tout le temps. On ne doit plus supposer un consentement tacite. Ca n’existe pas. Un consentement est exprimé.
Dans le premier cas les effets sont que mon cabinet se remplit de femmes qui se plaignent que les hommes ne les abordent pas. Et que la timidité et la gentillesse les font fuir. Et que les hommes ne savent plus définir leur masculinité car ils ont peur d’être agressifs.
Et j’ai voulu pousser le bouchon pour illustrer le consentement à tout prix dictée par la morale populaire par l’histoire de Tom.
La suite des aventures de Tom dans le prochain article…
#partagetonarticle 😉
Matthieu Tison est titulaire d’un Diplôme Inter-Universitaire d’Étude de la Sexualité Humaine délivré par la faculté de médecine de Cochin à Paris V. Par la suite, il a poursuivi sa formation pendant 18 mois auprès de ses collègues québécois à l’Académie du Sexocorporel Desjardins.
Depuis 2013, il offre un accompagnement à des individus célibataires ou en couple cherchant à mieux comprendre leur sexualité. Il est souvent sollicité par des hommes en quête de solutions pour traiter des problèmes d’érection et d’éjaculation. De même, les femmes le consultent fréquemment pour des questions relatives à la libido, à l’orgasme et aux douleurs lors des rapports sexuels.
Matthieu Tison a lancé LeBlogSexologue.com au début de l’année 2020 dans le but de fournir à tous des ressources pour s’épanouir dans leur sexualité